L'histoire de la broderie et de l'art du fil

Il faut sans doute remonter à la préhistoire pour rencontrer les premières broderies. Certes, elles n'avaient rien de commun avec celles d'aujourd'hui, mais déjà à cette époque, elles représentaient une richesse personnelle, un signe extérieur du statut social de celui qui la portait ou de l'événement pour lequel on se parait. Ainsi, le chef, le sorcier ou quelque autre membre important de la tribu était reconnaissable aux signes distinctifs qu'il portait sur ses vêtements. Perles d'ivoire, fragments d'os, cheveux, cuirs colorés ou blanchis, pièces de fourrure, la matière première était à portée de main et abondante, la richesse d'un modèle dépendant surtout de la créativité de son exécutant. On ne peut toutefois parler déjà de brodeur, même s'il est probable qu'une personne particulièrement douée pour cette activité soit préposée à la réalisation des motifs les plus délicats.

Le premier art plastique.


Par son ancienneté, la broderie est sans doute un des premiers arts plastiques. Elle prendra son véritable essor dans l'Antiquité. La richesse des motifs et des matériaux évoluera au cours des millénaires. Deux mille ans avant J.C., la découverte des métaux tels que le cuivre, le bronze, l'or et l'argent permit de diversifier les techniques. Le travail exceptionnel des artistes de cette époque, qui parvenaient à exécuter des motifs d'une grande finesse comme à fabriquer de simples perles ou paillettes, s'étendit jusqu'à la création du fil de métal. Ce fil si fin permit la réalisation de véritables dentelles sur lesquelles, dès le Ve siècle avant notre ère, la brodeuse (le terme existe sûrement déjà, car la Bible, au chapitre 27 du Livre de l'Exode évoque un rideau de vingt coudées artistiquement brodé en lin retors) enchâssera des pierres précieuses et semi précieuses. Au cours de ces siècles, les textiles joueront un rôle essentiel. Ils permettront à la brodeuse de réaliser des modèles de grandes dimensions.

Toutes ces découvertes successives ont permis aux broderies de s'embellir et de s'enrichir. Cependant, il faudra attendre les XVe et XVIIe siècles pour connaître l'apogée de la broderie car ce sont bien les siècles des splendeurs.
La broderie est un luxe que seule une classe de privilégiés peut s'offrir : les riches membres de la famille royale, les hauts dignitaires, la grande bourgeoisie désireuse d'afficher une certaine grandeur, sans oublier les municipalités qui recevaient leurs hôtes de marque avec magnificence et l'Eglise grande utilisatrice qui profita des dons parfois spectaculaires offerts en dévotion.
Tout se prête à la broderie, les vêtements tant féminins que masculins, les tissus d'ameublement, et également les meubles, le moindre bibelot, les livres, la livrée des domestiques, l'harnachement des chevaux, les carrosses… Rien n'est oublié. La broderie est d'une extrême finesse, de soie, d'or ou d'argent, au petit-point, en peinture à l'aiguille ou en couchure. Ces matériaux nobles et ces techniques délicates font que le nombre d'heures nécessaires à la réalisation des modèles et leurs prix sont considérables.

La demande est si importante que de nombreux ateliers vont se créer. Colbert, promoteur des grandes industries , ouvre les grandes manufactures, et parallèlement prohibe les produits textiles manufacturés à l'étranger, comme les dentelles, les broderies et les toiles peintes des Indes dont nous parlerons dans un autre chapitre. En 1667, la Manufacture royale des meubles de la couronne ouvre ses portes aux Gobelins sous l'autorité de Le Brun, suivie par la fondation de l'atelier de broderie du couvent Saint-Joseph à Paris qui contribua plus tard à la décoration du château de Versailles, puis à celle des châteaux de Noisy-le-Roi et de Saint-Cyr (créés par Madame de Maintenon). Ces ateliers ne sont pas les seuls à broder. Effectivement, de nombreux couvents où la dentelle et la broderie font depuis toujours partie de la vie monastique, jouissent d'une réputation égale voire supérieure aux ateliers les plus célèbres, tel celui des Ursulines d'Amiens.

Cet engouement pour la broderie se prolonge jusqu'à la moitié du XVIIIe siècle. Dès lors, les goûts changent. Des tissus brodés arrivent d'Orient et d'Extrême-Orient à des prix très bas. La petite bourgeoisie peut maintenant s'offrir ce luxe dont elle rêvait depuis tant d'années. Mais avec cette nouvelle explosion dans le monde de la broderie prennent fin les siècles des splendeurs.

La broderie Lunéville


La Lorraine est depuis fort longtemps un haut lieu de broderie. Depuis le XVe siècle y sont élaborés des motifs de couleurs, d'or et d'argent, réalisés à l'aiguille. La broderie blanche - exécutée au fil de lin blanc sur filet ou sur mousseline - apparaît au XVIIIe siècle et se développe dans toute la région. Le roi Stanislas Ier, installé à Lunéville où il tient une cour brillant, favorise son essor.
La Révolution française entraîne tout le pays dans une longue crise qui prendra fin grâce à l'impératrice Joséphine qui relance la mode de la broderie blanche. En 1805, on compte à Nancy entre 4 000 et 5 000 ouvrières. En 1807, plusieurs ateliers de jeunes ouvriers ouvrent leurs portes. Certains de ces enfants, filles et garçons, n'ont que 7 ans. En 1811, les demoiselles Cazottes brodent le voile du berceau du Roi de Rome.

Le point de Lunéville, qui depuis le XIXe siècle doit son nom à la ville, est avant tout un pont de chaînette exécuté sur du tulle. On y découvre la possibilité d'utiliser un crochet pour réaliser le point sur un support tendu sur un métier.
Grâce à cette technique, la vitesse d'exécution s'accélère, le travail est plus précis, les motifs peuvent être plus délicats et le point beaucoup plus petit. Le fait de tendre le tissu sur un métier donne à l'ouvrage un très beau fini : le tissu ne fronce plus autour des parties brodées et il n'est plus déformé par les manipulations. De nombreuses villes de l'est brodent au crochet ou à l'aiguille sur tulle ou sur mousseline de soir mais également sur des toiles très fines de lin ou de coton telles la batiste, la percale ou, moins connu de nos jours, le jaconas (toile de coton intermédiaire entre la mousseline et la percale). La broderie blanche de luxe lorraine est si réputée que de nombreuses maisons ont une filiale à Paris et jusqu'à Londres et New-York.

Si la technique de la broderie a évolué, il en va de même pour la broderie elle-même. Blanche hier, elle se fait maintenant noire ou colorée. Toutefois, la renommée de Lunéville ne viendra qu'en 1865 lorsque Monsieur Ferry-Bonnechaux découvre la technique permettant de poser les perles et les paillettes à l'aide du crochet. Le succès est immédiat. En 1875, c'est la vogue du jais noir ; en 1889, on la pare de toutes les couleurs. En 1891, les paillettes plus légères et plus brillantes sont, elles aussi, à la mode. C'est une véritable envolée de la broderie. Chaque année la mode a ses exigences, aussi les brodeurs doivent innover, inventer et proposer des couleurs et des motifs toujours nouveaux.

La guerre de 1914 mettra un frein à ce commerce florissant jusqu'en 1918 où les années folles raccourcissent les robes et les couvrent de perles. Jusqu'en 1928 les brodeuses ne cessent d'œuvrer pour satisfaire à la mode, à la ville dans les ateliers, mais aussi à la campagne où les ouvriers travaillent à domicile. La première école d'apprentissage voit le jour en 1924.

Aujourd'hui, la broderie Lunéville, ou à l'aiguille, sert essentiellement la haute couture, le prêt-à-porter de luxe, le music-hall et plus rarement l'ameublement. Les grandes maisons de broderies se trouvent à Paris, on n'en compte plus que quelques-unes en Lorraine.

La Haute Couture

La haute couture est incontestablement née en France. D'ailleurs, le terme français de haute couture est utilisé dans le monde entier. Si la France exerce aujourd'hui le monopole de la mode en Europe, pourtant jusqu'au XIXe siècle il n'y existe pas de créateurs à l'instar des grands couturiers. La mode est dictée par la clientèle aristocratique et bourgeoise. Ce sont les salons qui donnent le ton.
Il faut attendre en 1857 l'arrivée d'un certain Charles-Frederick Worth qui ouvre au n°7 de la rue de la Paix une boutique où il crée ses modèles. En deux ans, il devient le couturier attitré de l'impératrice Eugénie. Il contribuera au renouveau de la soierie lyonnaise. Pour la première fois, un couturier dicte la mode et la rue de la Paix devient la rue la plus élégante de Paris.

En 1888 est crée la Chambre syndicale de la haute couture française. Elle définit le règlement que doit appliquer tout couturier voulant âtre reconnu comme " grand couturier ". Par exemple, le nombre de défilés annuels, de modèles, de mannequins pour chaque collection, etc. Le prêt-à-porter verra le jour dans les années 30 sous l'impulsion de quelques maisons de couture, mais c phénomène prendra réellement son envol en 1960.

En 1970 apparaissent les premiers stylistes et, dans le même temps, c'est la rupture définitive entre le prêt-à-porter et la haute couture. Débute une nouvelle ère dans les relations entre la haute couture et le stylisme de mode.

La broderie provençale

Marseille est depuis des temps immémoriaux une porte ouverte sur le monde. Les croisés y rapportent les soieries d'Orient, le coton, les produits nécessaires aux teintures et les toiles peintes de l'Inde et du Levant. Ces indiennes très prisées sont prohibées au XVIIIe siècle par Colbert. Leur prix excessif en contrebande pousse alors les femmes à les imiter. De là naissent les toiles brodées en fil de laine fin au point de Beauvais. Ce point n'est rien d'autre qu'un très petit point de chaînette qui souligne les traits et remplit les motifs. Si le point utilisé est unique, les couleurs sont très variées. Cette chaînette se réalise à l'aide d'un crochet. Ce travail prodigieux est cependant moins prisé que les toiles peintes.

Le boutis

Le piqué, précurseur du boutis, est employé dès le XIVe siècle en Italie puis en Provence. La technique consiste à tendre sur un métier une toile de peu de valeur ou des étoffes rapiécées qui servent de fond à l'ouvrage. Une couche de ouate de coton est posée dessus et le tout recouvert d'une belle étoffe. Le dessin, s'il est constitué de lignes droites, est réalisé à l'aide d'un fil enduit d'une poudre bleue tendu au-dessus du tissu et que l'on fait vibrer. Pour les motifs ou les tracés en courbe, on ponce le tissu avant de le monter sur le métier. Les trois couches sont réunies par des points avant. Le boutis, spécialité de Marseille et de la Provence occidentale, est un piqué dont la technique consiste à réunir les deux tissus par des points arrière puis à introduire des mèches de coton à l'arrière de l'ouvrage à l'aide d'une aiguille. Cette technique permet de réaliser des motifs d'une extrême finesse. Certains de ces boutis furent rebrodés au pont de Beauvais.

La broderie haute couture

Hier, on reconnaissait une broderie de Venise à sont point caractéristique à l'instar du Lunéville, de la broderie blanche et de toutes les broderies définies par une technique bien particulière. Celle-ci pouvait ainsi promouvoir une ville, une région et même tout un pays dont elle portait le nom comme une marque de fabrique. On recherchait avant tout la perfection du point et des motifs de plus en plus délicats.

De nos jours, si les techniques de base n'ont pas changé, les nouvelles matières, les produits modernes ont apporté à la broderie un certain renouveau ; mais surtout, elles ont changé son image. Aujourd'hui, un brodeur est un créateur. Il utilise les différentes techniques et les points comme un peintre des couleurs pour donner du relief au modèle qu'il réalise. On reconnaît parfois le brodeur à sa broderie comme le peintre à ses tableaux.

Le métier à broder

Le métier à broder, tel que nous le connaissons aujourd'hui, existe depuis le Moyen Âge. Des tableaux et tapisseries les représentent. On utilisait déjà des cadres destinés à tendre les peaux à broder dès que les hommes ont commencé à se vêtir. On retrouve les mêmes cadres dans le monde entier. On sait depuis toujours qu'il faut tendre le tissu avant de le broder afin de ne pas le déformer durant le travail.

broderie tigre

Après des études de stylisme à l’école de la « Chambre Syndicale de la CoutureParisienne », elle découvre la broderie haute couture qui lui donnera degrandes possibilités créatives. C’est dans les plus grands ateliers de broderie tel que : Lesage, Vermont, Montex, qu’elle acquiert une solide expérience professionnelle faite de rigueur et d’exigence.

En 1998, elle choisit de voler de ses propres ailes pour donner libre cours à son talent et à l’orientation généreuse qui l’anime : non seulement exercer mais transmettre son savoir-faire.


Vase chinois brodé en relief.
« Pour moi, la tradition n’a de sens que si elle est accompagnée par la passion des artisans qui la transmettent ». Très vite les techniques de broderie traditionnelle ne suffisent plus. La dentelle aux fuseaux, le macramé, le crochet, le tricot permettront une plus grande diversité dans la création.
L’école de broderie

Depuis 1998 Claire Liotta anime des stages de broderie traditionnelle dans son atelier. Un public très diversifié de tous ages et de tous horizons vient suivre son enseignement. En 2004, elle ouvre l’école aux étudiants désireux d’acquérir une formation complète des techniques qu’elle utilise. Ici la broderie est un réceptacle ouvert à la créativité. Deux années d’étude seront nécessaires.

La première année les élèves apprennent les techniques de broderie traditionnelle mais également, la dentelle aux fuseaux, le macramé, le tricot et la passementerie. Au cours de l’année, ils réalisent des échantillons et des ouvrages qui leur permettent de détourner ces techniques de leur utilisation première. En fin d’année un modèle est réalisé en commun.

La deuxième année, l’accent est mis sur les matières. Les tissus, les perles, les paillettes, les rubans, etc… qui seront utilisé comme des matières premières et non comme des produits finis. Ils seront détournés et transformés. Seront également utilisés, des produits tel que les résines, les peintures textiles, les matières naturelles, etc… Autant de possibilités qui apporteront leur pierre à l’édifice.

Lys brodés en broderie Lunéville

Notre école est un organisme de formation privé en externat.

L’école est ouverte du lundi au vendredi
de 9h à 12h30 et de 13h30 à 19 h.

Les élèves étrangers peuvent obtenir une prolongation de leur carte de séjour après leur inscription.

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